Valérie Verdier a remis les insignes de Chevalier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur à Alice Desclaux, pour récompenser l’ensemble de sa carrière.
Attachée aux valeurs partenariales et éthiques de l’IRD, Alice Desclaux démontre par son parcours scientifique – par ses travaux de recherche ainsi que sa trajectoire, notamment à l’occasion de sa présence prolongée au Sénégal – l’exigence portée par l’Institut quant à l’excellence de la recherche scientifique, tournée vers le Sud et au service de la décision publique.
Elle est, depuis une quinzaine d’années, un élément clé des partenariats entre les mondes de la recherche africain et français, ainsi qu’une référence scientifique dans l’étude des systèmes de santé africains.
Médecin devenue anthropologue, Alice Desclaux a développé des recherches sur le rapport individuel et collectif à la maladie essentiellement dans les pays du Sud. Ses travaux combinent une perspective appliquée (réponse aux questionnements des personnes atteintes et des acteurs de santé en vue d’améliorer les dispositifs de communication, de prévention et de soin) et une perspective théorique (compréhension du sens donné à la maladie et de ses effets, de ses évolutions ainsi que des dynamiques sociales et idéelles qu’elle reflète).
C’est la survenue d’une épidémie d’Ebola sans précédent qui l’a amenée à s’investir dans la riposte aux épidémies. D’abord en Guinée, toujours avec une approche transdisciplinaire relative aux survivants à l’infection du virus Ebola et en structurant la préparation de la réponse à de futures épidémies.
Par la suite, son rôle précurseur dans l’approche pluridisciplinaire et en recherche opérationnelle sur le VIH a démontré la pertinence de ce double regard (médico-clinique et anthropologique) dans l’accompagnement et l’évaluation de la première initiative nationale africaine d’accès au traitement antirétroviral.
La survenue de l’épidémie de COVID l’a conduite à s’investir massivement dans la recherche et la formation sur ce nouveau défi. Alice Desclaux a donc animé au nom de l’IRD, le Groupe Recherche Opérationnelle de la Plateforme COVID-19 pour la région Afrique de l’ouest et du centre. Cette plateforme coordonnée en collaboration avec l’organisation mondiale de la santé (OMS) a permis de poser les principes et le cadre d’une coordination opérationnelle régionale de la réponse au COVID-19.
Par son travail et sa double expertise (de médecin et d’anthropologue), Alice Desclaux a contribué de façon significative à la réflexion et au plaidoyer en faveur de l’accès gratuit aux traitements du sida à partir de l’exemple sénégalais. Elle a ainsi pu mettre en lumière des « évidences » scientifiques dont se sont emparés les dirigeants du Sénégal pour promulguer au début des années 2000 la gratuité des traitements.
Sa démarche directement attachée aux problématiques de terrain lui a conféré un rôle central dans les Sciences Humaines et Sociales françaises, particulièrement dans cette exigence à faire dialoguer médecins et anthropologues. Alice Desclaux joue ainsi un rôle majeur dans la formation d’anthropologues français et étrangers et contribue largement et activement à la création du réseau des anthropologues de langues françaises spécialisés dans la réponse aux épidémies.
Au cours de ses 15 dernières années passées au sein de l’IRD, sa fibre enseignante (elle devient Maître de conférences en 1999 puis professeur d’Anthropologie avant de devenir Directrice de Recherche à l’IRD), ne s’est jamais démentie et cet engagement a favorisé la formation des chercheurs du sud, dont certains sont devenus aujourd’hui des collègues et partenaires de recherches et de projets. Un engagement qui dépasse la seule vocation de partage des savoirs, qui se redouble d’une attention minutieuse portée à la relecture des travaux de ses jeunes collègues pour favoriser leur volonté de publications, et encourager leur exigence, particulièrement en ce qui concerne leurs travaux de thèse.
Les travaux qu’Alice Desclaux poursuit aujourd’hui portent donc essentiellement sur les épidémies émergentes et la santé globale, mais aussi les usages de drogues et leur médicalisation.